Fabienne Goutille, autrice de la thèse en ergonomie intitulée « Ne plus ignorer les agriculteurs : une contribution de l’ergonomie à la prévention du risque pesticides en milieu viticole », préparée et soutenue à l’Université de Bordeaux, sous la direction d’Alain Garrigou et Marc-Éric Gruenais, est la lauréate du Prix de thèse Gestes 2023.

Le Prix de thèse sera officiellement remis à Fabienne Goutille à la MSH Paris Nord, qui recevra un chèque de 1500€, le jeudi 1er février à la MSH Paris Nord (Salle panoramique), de 16h à 17h30.

Inscription gratuite mais obligatoire via ce lien.

Le travail de Madame Goutille cherche, au-delà de la prise en compte des expositions aux pesticides des agriculteurs en milieu viticole, à « accompagner les agriculteurs à construire leur santé dans un contexte social qui les rend responsables de leurs propres expositions ou de celles du reste de la société (riverains, consommateurs, membres de la famille). »

Une recherche accompagnée d’un film pour sensibiliser les agriculteur·ices

Réalisée à partir de témoignages, d’images et de métrologies, enregistrés pour les besoins de la recherche-intervention Prevexpo (Prévenir les risques ensemble en milieu viticole à partir des conditions réelles d’exposition), la thèse et le film1 qui l’accompagne permettent de saisir l’activité de traitement de la vigne de plusieurs points de vue. Regards des uns sur les autres, regards qui se jaugent, qui se croisent pour parvenir à une compréhension réciproque de cette activité. Viticulteurs et chercheurs de divers horizons scientifiques (ergonomes, anthropologues, toxicologues, métrologues, agronomes, chimistes et épidémiologistes) croisent et confrontent leurs points de vue au sein des exploitations viticoles, œuvrant ensemble pour « assainir un milieu de travail » (Oddone et al., 1999).

Fabienne Goutille, candidature Prix de thèse Gestes 2023

Un travail qui veille à impliquer les agriculteur·ices

Les professionnels viticoles ont pu s’approprier la métrologie proposée et la développer pour rechercher les situations à risque pesticides en fonction de leurs expériences et préoccupations personnelles, jusqu’à avoir suffisamment d’éléments pour agir. Ils ont choisi les points de prélèvements des pesticides, certains ont réalisé eux-mêmes les observations instrumentées et tous ont développé de nouvelles pratiques pour contourner les situations d’exposition repérées dans leur quotidien.

Fabienne Goutille, candidature Prix de thèse Gestes 2023

Une méthode qui permet de déployer un dispositif de prévention mieux adapté

Finalement, en reliant la dimension individuelle et personnelle de l’activité à sa dimension contextuelle et structurelle, les actions de prévention à mener ont ainsi pu être envisagées à l’échelle de l’entreprise puis à l’échelle du territoire, là où s’organise l’usage des produits phytopharmaceutiques, pour permettre aux agriculteurs le développement de situations de prévention.

Fabienne Goutille, candidature Prix de thèse Gestes 2023

L’enjeu de la thèse : agir sur les politiques de santé au travail

Cette thèse appelle à développer les politiques de santé au travail en milieu agricole et propose d’agir sur trois niveaux de prévention. Au niveau tertiaire, elle souligne l’importance de mettre en visibilité et de reconnaître les expositions réelles subies par les agriculteurs. Au niveau secondaire, elle propose le développement d’outils de métrologie populaire et d’espaces de discussion centrés sur les préoccupations des personnes en activité pour outiller la compréhension et la gestion des expositions par les agriculteurs et les différents acteurs de la santé au travail. Au niveau primaire, elle appelle à agir sur les leviers organisationnels identifiés pour limiter l’exposition aux pesticides et réduire la charge mentale des agriculteurs qui occupent à la fois le rôle d’employeur et de travailleur. En conclusion, cette thèse permet de porter un regard renouvelé sur l’exposition des agriculteurs trop souvent reliée à leur présumée ignorance. Elle montre que ce qu’ils semblent régler efficacement au quotidien les affecte profondément au fil du temps sans leur laisser l’espace et les moyens de s’organiser. En l’absence de prise en compte de leurs préoccupations, de connaissances scientifiques non reliées à leur besoin, et sans mise en pratique partageable avec les pairs, la prévention du risque pesticides ne peut prétendre s’inscrire dans une démarche de santé au travail.

Fabienne Goutille, candidature Prix de thèse Gestes 2023

  1. Le film Rémanences est accessible au lien suivant : https://www.youtube.com/watch?v=mvmYLDz-RbE ↩︎